The Project Gutenberg EBook of Contes, anecdotes et recits Canadiens. by Aristide Filiatreault This eBook is for the use of anyone anywhere at no cost and with almost no restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or re-use it under the terms of the Project Gutenberg License included with this eBook or online at www.gutenberg.org Title: Contes, anecdotes et recits Canadiens. Author: Aristide Filiatreault Release Date: June 13, 2004 [EBook #12602] Language: French Character set encoding: ASCII *** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK ANECDOTES ET RECITS CANADIENS *** Produced by Renald Levesque and the Online Distributed Proofreading Team. Thanks to the Bibliotheque nationale du Quebec A. FILIATREAULT CONTES ANECDOTES ET RECITS CANADIENS DANS LE LANGAGE DU TERROIR AVEC ILLUSTRATIONS par RENE BELIVEAU MONTREAL: I. FILIATREAULT, EDITEUR 1910 INDEX Preface Preambule La Culotte a Baptiste La Cremation Le Coq a la Mere Superieure Le "Beu" a Napoleon Les Punaises du Canada L'Appendicite La Jument a Ma Tante Cayen Prout! Prout! Prout! La Route du "Pays Fin" Les Filles de 'Maska Baptissette Dufour Forts comme les Archambault Le P'tit Taureau Croise Le Cochon a Toinon Le Batte-Feu a Ponce-Pilate Une Maladie Cutanee Le Telephone La Balance a Pierre PREFACE Que je vous fasse une preface? Fasse le ciel que je le pusse! Mais je ne suis pas prefacier! Je ne pourrais plus meme faire un livre. Et vous voulez que je jette ma note triste, lamentable, rond-de-cuiresque, et par consequent discordante, dans votre concert de joyeusetes gauloises quoique canadiennes? Tant pis pour vous si je reussis trop bien, ou trop mal, ou si je ne reussis pas du tout. Tu l'auras voulu, _Georgette Dandine_. Si je prete a rire, ce sera encore une maniere d'amuser vos lecteurs. Vous leur revelerez un nouveau type de canayen: le prefacier par persuasion. A propos de types, les bonnes feuilles que vous m'adressez en pourtraicturent plusieurs qui sont bien du pays. Le Franco-Canadien est reste Latin; il est surtout reste Gaulois. Mais le climat, l'entourage, le frottement avec d'autres races lui ont fait une mentalite a part. Avec le temps cela a un peu deteint sur son caractere. L'humour anglais et americain ne lui est pas inconnu. Il etait deja pince-sans-rire, il est devenu gouailleur a froid. Le mot sale ne l'effraye pas outre mesure. Il en abuse parfois en petit comite, s'il ne sait pas toujours le dissimuler sous une couche suffisante de vernis. Il n'a pas autant que son aieul le Francais l'art de dire des choses inconvenantes d'une facon convenable. On lui a souvent repete qu'il parle la langue de Racine; ne vous etonnez donc pas si, dans ses acces d'archaisme, il s'efforce de remonter jusqu'a Rabelais et y parvient dans une certaine mesure. Les anecdotes que vous livrez a la publicite nous le peignent assez bien, ce qui n'empechera pas certains de vos personnages de rester mal peignes. Ce n'est pas votre faute: il faut leur laisser la tete qu'ils ont. Grimes d'une autre maniere, ils n'auraient plus de raison d'etre. Toutefois, si vous entreprenez de presenter au public tous les originaux du terroir, vous en entreprenez la un _tannant_ de _stunt_, comme dirait Jules Lemaitre. Vous avez un _job_ qui durera jusqu'au jugement dernier, le plus redoute des jugements a cause de son incontestable justice. Et maintenant que je vous ai fait pleurer, faites-moi rire. REMI TREMBLAY PREAMBULE Je n'ai nullement l'intention, en publiant ces contes, de me poser en litterateur: mon seul desir est d'interesser mes lecteurs en leur narrant des histoires de leur pays, ou l'esprit court les rues, bien certain de trouver toujours et partout bon gite et bon accueil dans toutes les familles canadiennes-francaises, ou le rire de bon aloi est toujours le bienvenu. Il est notoire que meme dans les circonstances les plus tragiques le Canadien-Francais voit d'abord le cote comique et en profite pour rigoler. C'est sa nature. Il ne faut donc pas lui reprocher ce desir si legitime de s'amuser, tout en ne causant aucun tort a son prochain. Je suis l'ennemi acharne de la reclame personnelle, mais j'ai vu un si grand nombre d'exotiques et d'indigenes qui se sont fait un piedestal de leur signature que je ne vois pas pourquoi je n'en ferais pas autant. Il parait que ce n'est pas un crime puisque ceux qui ont pris ce moyen de parvenir sont arrives aux honneurs et aux places lucratives. Voila tout ce que j'ai a annoncer dans ce court preambule et a vous designer mon camarade. Ce dernier est un artiste dessinateur de grand merite, qui a etudie a Paris sous les grands maitres et a su profiter de leurs lecons. Inutile avec lui de se casser la tete a donner des explications: la simple lecture du texte suffit a le renseigner; d'un coup de crayon, il a rendu exactement la pensee de l'auteur. On admettra facilement que dans de telles conditions le travail est attrayant. Nous allons donc essayer a nous deux de vous donner de l'amusement, et si nous n'y reussissons pas, il nous restera une ressource: celle d'imiter l'exemple du Pere Richard, de joyeuse memoire, et d'en engager un autre. Il ne me reste qu'un mot a ajouter a l'adresse de mes bons amis: c'est de m'excuser du retard involontaire que j'ai apporte a la publication de cet opuscule dont la preparation demande beaucoup plus de travail qu'on ne croit generalement. Neuf longues semaines de maladie serieuse soufferte sans aucune resignation, mais en rageant tout le temps m'ont oblige de garder la maison a mon grand detriment, et en courant un risque serieux d'avarier ma part de salut. J'espere, toutefois, qu'il n'en sera rien. Merci a mon vieil ami Tremblay qui a si gracieusement acquiesce a ma demande en m'envoyant une courte preface qui resume toute la publication. A. FILIATRAULT LA CULOTTE A BAPTISTE [Illustration] J'ai le bonheur de posseder, dans la personne d'un brave habitant de La Renouche, Baptiste Latremouille, un ami sincere et devoue, qui me conte toujours des peurs chaque fois que je le rencontre en ville. Je vous le presente sans ceremonie. La derniere anecdote qu'il m'a narree est vraiment renversante, et je vous la donne telle quelle, en laissant a Baptiste la responsabilite de son recit. Baptiste, quand il m'a raconte cette histoire, l'a mise sur le dos d'un de ses voisins, mais je suis persuade qu'il ne disait pas la verite sous ce rapport. C'est la raison pour laquelle je le mets en cause lui-meme. Comme tous les habitants du Canada, il est ruse, ce qui ne l'empeche pas de se faire pincer de temps a autre. S'il m'a induit en erreur, tant pis pour lui, je le considere, toutefois, comme le veritable gaillard qui a ete la victime de cette aventure. Un lundi de juin, l'an dernier, Baptiste avait decide de venir a Montreal pour affaires, mais il y avait une grave difficulte a surmonter. Le fessier de sa culotte etait perce a jour, et il ne pouvait decemment entreprendre ce voyage dans ces conditions. Il s'adressa a sa femme et lui demanda de faire ce raccommodage imperatif. --J'ai pas d'aiguille. Vas en charcher ane au village. Pour tout avoir Baptiste n'avait qu'un billet de cinq piastres qu'il conservait precieusement pour ses depenses de voyage. --Donne-moe des coppes. --J'en ai pas, mais prends un oeuf et tu le changeras pour ane aiguille. Baptiste prit un oeuf dans l'armoire et se rendit au village, droit au magasin general, chez Joe Ladebauche. --Dis donc, Joe, le fond de ma culotte est perce a jour, et ma femme a pas d'aiguille pour le raccommoder, veux-tu m'en changer ane pour un oeuf? --Mais oui, mais oui, mon vieux Baptiste. Avec plaisir. Joe prit l'oeuf et le deposa sur une tablette. Baptiste s'etait accoude sur le comptoir et semblait ruminer quelque chose. Tout a coup: --Dis-donc, Joe, quand tu fais du commarce, des bargains, t'as pas l'habitude de payer la traite? --Eh oui. Quoi-ce que tu vas prendre? --Donne-moe un verre de brandy et un oeuf. Joe Ladebauche, qui trouvait ca drole, s'empressa d'acquiescer a sa demande. --Tiens, dit-il, voici le verre de brandy, et je te casse ton oeuf dedans. Ca fait un "gobbe" de premiere classe. Dans l'intervalle, Baptiste avait plante son aiguille dans le revers de son capot. --Ecoutes donc, veux-tu du laitte dans ton verre? --Non, marci, mais t'es pas pour me "bluffer". Donne-moe une autre aiguille, parce qu'il y avait deux jaunes dans c't'oeuf-la. Amenes-toe tout d'suite. Baptiste revint a la maison avec ses deux aiguilles et sa femme lui raccommoda son fond de culotte en bouracan. Cette culotte etait a la bavaroise. Le lendemain Baptiste partait pour la ville et logeait dans un hotel du carre Chaboillers ou deux escaliers a la suite l'un de l'autre donnaient acces au deuxieme etage. Au moment de se mettre au lit, Baptiste ota sa culotte et la jeta negligemment sur une chaise. Vers trois heures du matin, un incendie se declara dans les environs, et Baptiste fut reveille en sursaut par le vacarme d'enfer cause par l'arrivee des pompiers. En effet, les pompes a vapeur, les echelles de sauvetage, les wagons, les devidoirs, les voitures d'ambulance, enfin, tout le tremblement, etait la. Baptiste, tout abasourdi, s'elanca hors du lit et se jeta dans sa culotte, mais, par malheur, elle se trouvait sens devant derriere, de telle sorte que toute la devanture bombait. Dans sa precipitation, en arrivant a la tete de l'escalier superieur, il manqua la premiere marche et descendit tete beche les deux escaliers jusque sur le trottoir. On s'empressa de le relever et comme on lui demandait s'il s'etait fait mal, il repondit: --C'est pas d'ce que j'm'su' fait mal, mais en me r'gardant comme y faut, j'm'apercois que j'su'detord en bedeau! LA CREMATION [Illustration] Deux bonshommes de 80 ans bien sonnes suivent la depouille mortelle d'un autre vieux camarade qui leur avait demande avant de mourir d'assister a l'operation de l'incineration. Comme ils avaient le respect des dernieres volontes de leur ami, ils assistaient impassibles a la ceremonie. Depuis plus de trois heures deja, le mort cuisait dans son jus, et les deux vieux etaient fatigues. Tout a coup, l'un des deux dit a l'autre: --Dis donc, Hyacinthe, sais-tu que ca prend du temps? --Je l'admets. Mais rappelle-toi bien ceci, notre ami Honore a toujours ete, tout le temps de sa vie, un dur-a-cuire! LE COQ A LA MERE SUPERIEURE [Illustration] Un jour le cure de St-E... rendait visite a la Mere Superieure du couvent. Il la trouva dans un etat impossible a decrire, tant etaient navrants sa detresse et son ennui. Le cure, bon enfant, lui demanda la cause de cet ennui. --Ah! Monsieur le cure, un grand malheur nous est arrive. Imaginez-vous que nous avions mis douze couvees d'oeufs avec un treizieme sous autant de poules, et nous n'avons pas eu un seul poulet. --Ma reverende soeur, il faut bien se resigner. A quelle cause attribuez-vous cette affliction? --Je n'en sais absolument rien, Monsieur le cure. Les oeufs ont ete pondus par nos poules, ici meme. Je ne comprends pas du tout, et je cherche a me rendre compte. --Ma bonne soeur, c'est probablement la faute du coq? --Mais non, mais non, Monsieur le cure. C'est impossible. Nous n'avons pas de coq! LE "BEU" A NAPOLEON [Illustration] Mon ami Napoleon C..... est aujourd'hui un avocat distingue, qui a reussi a se creer une tres belle clientele et en meme temps est parvenu a se faire elire maire d'une grande ville du Canada par ses talents superieurs et son intelligence. A l'age de vingt-cinq ans, il etait apprenti typographe dans l'atelier de son cousin, M. Treffle Berthiaume. Voyant que le metier ne le conduirait a rien, il prit la resolution d'etudier le droit. Recu avocat, il s'etablit a Hull. Des le lendemain il rendait visite a M. Alfred Rochon, alors avocat, pour lui presenter ses hommages. M. Rochon avait dans ses bureaux deux gros coffres-forts dans lesquels il serrait ses valeurs et ses dossiers precieux. Apres les compliments d'usage, mon ami Napoleon fit la remarque suivante: --Mon savant collegue, j'ai grandement hate d'avoir comme vous un gros coffre-fort dans mon bureau. --Votre ambition est fort legitime, mon jeune ami, lui repondit M. Rochon, mais croyez bien que d'apres ma vieille experience, une bonne poche de culotte bien doublee en chamois est suffisante pour tous vos revenus pendant au moins une quinzaine d'annees. Mon ami Napoleon, en outre de ses talents incontestables, avait une particularite dans la vue qu'on ne rencontre pas souvent chez le commun des mortels. Il louchait horriblement, mais d'une maniere qui n'appartenait qu'a lui. Son regard, au lieu de se diriger vers l'ouest d'un cote et vers l'est de l'autre, etait oblique, de sorte que les deux yeux convergeaient vers le meme point. Comme c'est un bon luron et un gai compere, il a toujours eu le mot pour rire, meme a ses propre depens. C'est ainsi qu'il raconte volontiers l'anecdote suivante: --Vous savez, moi, j'ai ete eleve a la campagne. On avait l'habitude de tuer un porc et d'abattre un boeuf tous les ans pour l'usage de la famille. Lors d'une operation de ce genre, l'homme engage tenait le boeuf par les cornes et j'avais la hache dans les mains, pret a frapper, lorsque notre engage m'arreta et m'apostropha ainsi: --Dis-donc, 'Poleon, es-tu pour fesser ousque tu r'gardes? --Mais certainement. --Oui. Eh ben, moe, j'te l'dis tout d'suite, j'lache le "beu." LES PUNAISES DU CANADA [Illustration] Il est parfaitement reconnu que le Canada, dans l'idee de la plupart des Francais qui sont venus s'etablir ici pour y gagner leur vie, est un pays a peu pres inhabitable; que ceux qui y resident sont tous des ignorants, et qu'il n'y a rien excepte de la neige et de la glace. En 69, je quittais la capitale de Terre-Neuve, St-Jean, a bord du Peruvian, de la ligne Allan, pour revenir a Montreal. Nous longions la cote de l'Ile, un paquet de roches de 300 milles de longueur jusqu'a la Baie des Iles, pour s'engager dans le detroit conduisant jusqu'au Golfe St-Laurent. Le commissaire de bord, un Ecossais pas pour rire, vint me trouver et me dit dans son anglais aussi sec qu'energique: --Sir, I see by your name on the list of passengers that you are a Frenchman. --I beg your pardon, Sir, I am a thoroughbred Canadian, a loyal British subject of Her Gracious Majesty, but I speak French, as bad as it may be. --That's all right, Sir. It is all I want. Will you kindly interpret a French gentleman who does not speak a word of English? --Certainly, Sir, with pleasure. Il me presenta alors a un touriste qui venait chez nous dans le but d'etudier la geographie du pays. A la brunante, nous etions dans le detroit, nous dirigeant vers le Golfe. Toute la soiree, le Francais avait essaye de "m'emplir" avec les beautes et la grandeur de son pays, ou les fleuves et les rivieres, la Garonne, le Rhin, la Loire, la Seine etaient reconnus comme les plus grands cours d'eau de l'univers. Ca m'etait bien egal a moi. Cependant, mon orgueil national etait joliment froisse, tout de meme. La nuit avait remplace le crepuscule et nous voyagions sur la surface du golfe sans savoir le moins du monde ou nous nous trouvions. A cinq heures le lendemain matin, le golfe etait traverse et nous etions rendus a peu pres a la hauteur de la Pointe a Miscou, a l'entree de la Baie des Chaleurs, ou la largeur du St-Laurent est de vingt-trois lieues. --Monsieur, pouvez-vous me dire, s'il vous plait, quelle est cette mer interieure que nous traversons en ce moment? --Ca, une mer! Mais vous n'y pensez pas, Monsieur, c'est une simple riviere. --Ah! ca, dites-donc, voulez-vous vous payer ma tete? --Mais pas le moins du monde, mon cher Monsieur; je constate, voila tout. Vous m'avez dit hier soir que votre sejour au Canada serait de trois ou peut-etre six mois. Et bien! prenez mon conseil, allez dans le Nord de la Province ou tout le monde parle ce que vous appelez un patois qui se rapproche du francais, et quand vous aurez vu la Renouche, la Riviere du Nord, la Rouge, la Riviere du Chene, la Riviere aux Chiens, la Riviere Cachee, et combien d'autres! vous m'en direz des nouvelles. A Levis, je sautai a bord du train du Grand-Tronc et je n'ai jamais revu mon homme. Plus tard, en 1876, je travaillais a la Gazette, ou je levais la lettre, et j'avais ma pension dans une maison de la rue Saint-Dominique, avec un ami du nom de Oscar Lavigne, un polisseur de pianos. Nous avions avec nous un Toulousain, "vous comprenez bien, n'est-ce pas?" qui nous contait qu'en France les boeufs etaient plus gras, les chevaux plus gros,--"les Percherons, vous savez?"--les edifices plus beaux, les cheminees des usines plus hautes, et les femmes plus grosses, "trrr!"......... --Arretez un peu, dit mon ami Oscar, je ne doute pas de votre parole, mais vous admettrez bien qu'elles ne le sont pas aussi souvent que les Canadiennes! La conversation cessa de suite. Lavigne, cependant, n'etait pas satisfait, et la semaine suivante, nous nous amenames chez un marchand de la rue Craig, qui vendait des homards vivants. C'etaient, a cette epoque, des homards de 16 a 20 pouces de longueur, non pas des avortons comme ceux d'aujourd'hui. Il Il en acheta un de taille respectable et en revenant a la pension nous eumes la precaution de nous munir d'un flacon de gin de cinq demiards. Comme je demandais a Oscar ce qu'il comptait faire de ce crustace qui aurait pu etre utile s'il eut ete cuit, il me repondit: --Quittes faire, j'ai mon idee Le Toulousain nous invita a entrer dans sa chambre et le gin disparut bientot. On avait reussi a faire sortir notre Toulousain pendant quelques minutes, et mon bon ami Lavigne avait mis le homard sous les couvertures de son lit. Vers onze heures on couchait notre homme a peu pres plein. Dix minutes plus tard, le homard, qui s'etait oriente a reculons, pincait le Toulousain a l'endroit le plus sensible de sa personne. Il sauta hors du lit: --Nom d'une pipe! qu'est-ce que c'est qu'ca? --Ca, dit Lavigne, c'est les punaises du Canada, Tapez ca en France, si vous etes capable. * * * * * Les mots qui restent: En Cour Superieure, un avocat de Montreal bien connu par ses expressions pittoresques, s'adresse au President du tribunal. C'etait une cause au sujet de la pension d'un cheval de trait qui mangeait au ratelier depuis plusieurs mois a ne rien faire. --Croyez-vous en bonne foi, Votre Honneur, que nous allons garder ce cheval les deux bras croises dans notre ecurie beaucoup plus longtemps? Ce serait absurde. L'APPENDICITE [Illustration] ANGELIQUE Vadeboncoeur est une paroissienne comme on n'en rencontre pas souvent dans la vie. Elle vit le jour, je crois, dans une bourgade situee en arriere de Joliette. Ne sachant ni lire, ni ecrire, notre chere Angelique etait pourtant fort ambitieuse, ce qui etait tout a fait legitime de sa part. Ne voyant aucun espoir d'avenir dans son trou natal, elle prit la route des Etats Unis; elle entra dans un hopital, monta en grade, devint garde malade, et ne tarda pas a acquerir l'art de "magner" les cas les plus graves. Toutes ses tendresses et sa sollicitude etaient devouees a ses patients et elle leur donnait des soins vraiment maternels. Tout ce devouement meritait une recompense adequate, si j'ai foi dans la loi des compensations, et elle l'obtint au moment ou elle s'y attendait le moins, ayant fait son service par pur amour de son prochain. Un jour, elle rencontra dans son hopital un malade qu'elle soigna plus que de raison; elle lui prodigua tous les soins que son etat necessitait; il revint a la sante, il lui proposa le mariage. Elle accepta, et le couple vint resider a Montreal. Comme je vous l'ai dit plus haut, Angelique avait beaucoup de qualites solides, mais elle avait aussi un defaut redhibitoire dont elle ne s'est jamais guerie: elle se fourrait le nez dans toutes les affaires qui ne la regardaient pas. On m'objectera peut-etre que ce defaut est a peu pres general, mais je repondrai qu'il semble plus caracterise chez nous que partout ailleurs. Elle voulait a tout prix savoir ce qui bouillait dans la marmite de son voisin, et pour mieux arriver a ce resultat, elle avait deux paires de lunettes, l'une plantee sur le dessus de la tete pour voir ce qui se passait chez les gens qui habitaient au-dessus de son logis, et l'autre juchee sur son nez pour se rendre bien compte des agissements des voisins d'en face. Elle connaissait mieux les affaires de tout ce monde-la que les interesses. Un jour, un jeune homme du voisinage ayant subi l'operation de l'appendicite, elle expliquait a ma femme la nature de cette maladie. --J'vas vous dire, Madame, exactement c'que c'est qu'cette infirmite qu'est ben connue de tout l'monde. Les docteurs ne veulent pas l'dire aux pauvres gens, parc'que ca leurs empecherait d'faire de l'argent. Aussi, quoi-ce qui z'ont pas faite? Yont invente un nom qui fait peur au monde, et ils vous coupaillent un homme, l'temps de l'dire. Et pourtant, c'est ben simple, allez. Ca prend dans les alentours du nombril pour faire le tour du corps et arriver jusqu'au pommon des reins; de d'la ca r'monte jusqu'a la virgule drette; ca travarse ensuite la moelle sapigniere jusqu'a la virgule gauche pour descendre au pommon qui s'trouve proche d'la rate; ca r'part encore pour arriver plus haut, ce qui produit une soulevation du coeur et rendu la, faut qu'la personne renvoille. --Et comment appelez-vous cette maladie dans votre pays, dit ma femme imperturbable, une-pince-sans rire, je ne vous dis que cela? --J'vas vous dire, Madame, par cheux nous on parle pas dans les tarmes, vous savez; on est pas ben, ben instruit. Icitte, en ville, comme je vous l'ai deja dit, les docteurs ont invente un nom qui fait peur pour faire d'l'argent a bon marche. Y'appellent ca l'appendicite, tandis que l'vrai nom ben connu par tout l'monde, c'est l'devlourtement des tripes. * * * * * Un pauvre ouvrier se fait tuer a son travail vers sept heures et demie du matin. Il s'agissait d'avertir sa femme avec tous les menagements possibles. On chargea de ce soin l'un de ses camarades qui se fit fort d'annoncer l'accident a la veuve avec toute la delicatesse voulue. Il se rendit incontinent chez elle et la trouva en frais de laver sa vaisselle. --Ma chere dame, dit-il, j'ai une triste nouvelle a vous annoncer. Votre mari qui travaillait avec nous, est tombe du troisieme etage d'une maison en construction. Il s'est fracasse le crane, il est mort raide. Les camarades vous l'apportent, et ils seront ici dans cinq minutes. --Vrai? Eh ben! attendez; j'vas finir de laver ma vaisselle et vous allez voir une femme qui braille. LA JUMENT A MA TANTE CAYEN [Illustration] Mon ami Alphonse C....., employe aux douanes de Sa Majeste, ne a Sainte-Therese, a toujours ete et est encore, du moins je l'espere, un loustic pas mechant, mais capable de jouer des tours pendables chaque fois que l'occasion se presente. Il avait des chevaux vite a l'epoque et les faisait valoir. Un jour il se rendait a la Grande Cote quand il rencontra ma tante Cayen au detour du chemin conduisant a la Riviere Cachee, une rigole serpentant tout le long d'une oasis perdue dans ce coin du pays. On l'appelait la Riviere Cachee, parce qu'il n'y avait pas meme de trace d'une riviere. Ma tante La Gritte (Marguerite) etait la veuve d'un Acadien qui s'etait refugie dans notre province lors de la deportation, et par corruption on les appelait les Cayens. C'etait un tas, ma tante, une masse de chair pesant dans les 380 livres. Au reste, intelligente et homme d'affaires tant qu'on voudra. Elle conduisait une jument jaune, maigre, longue comme un jour sans pain, et elle s'etait juchee sur le siege d'une petite charrette, avec une hart a la main pour accelerer la marche de sa bete. En la rencontrant, mon ami Alphonse stoppa net. --Whoa! aie, la mere, voulez vous me vendre votre jument a la varge? --Ah! bouffre! Oui. --Combien? --Neuf francs la varge. --C'est bon, je l'achete. Alors, ma tante La Gritte, sans ceremonie, releve la queue de sa jument: --Entrez, M'sieu, l'commis va vous la mesurer. --Touche, touche! dit Alphonse a son camarade. * * * * * N'est-il pas vrai, Pere Patenaude, que dans votre temps vous etiez le meilleur tireur de Saint-Remi? --Ah! oui, Monsieur, c'est vrai. --Vous etes alle a Rome dans le but de tuer Garibaldi, n'est-ce pas? Qu'est-ce que vous avez fait pendant votre sejour a Rome, parmi les zouaves? --Y m't'uaient, j'en tuais, on s'tuait. --Et Garibaldi? --Y s'est sauve, l'crapaud, j'ai pas pu le r'joindre. PROUT! PROUT! PROUT! [Illustration] Monsieur J.M. Tellier briguait les suffrages des electeurs de son comte, il y a plusieurs annees. Il etait accompagne de deux formidables jouteurs, Messieurx C.A. Cornellier et Joseph Martel, avocat, qui avaient pendant plus de trente ans parle sur tous les hustings des deux provinces de Quebec et d'Ontario. Je n'ai pas l'honneur de connaitre M. Tellier dans l'intimite, ne l'ayant rencontre et n'ayant cause avec lui qu'une fois ou deux, mais j'ai beaucoup entendu parler de lui par des amis communs, et je sais pertinemment qu'il aime a rire. Inutile de vous raconter mon ami Cornellier par le menu, puisque Charles-Auguste est mieux connu dans le pays que ne l'etait defunt Barabas dans son temps et parmi son peuple. Ses brillants succes d'avocat criminaliste, son eloquence virile et entrainante, la surete de son jugement si bien pondere lui ont valu cette reputation qu'il merite a un si haut degre, sans compter une presence d'esprit qui lui permet de planter une cheville qui fait toujours juste chaque fois qu'il rencontre un trou a sa portee. Je lui suis redevable d'un grand nombre de ces anecdotes et souvenirs que je publie aujourd'hui, et ce ne sont pas les moins droles, tant s'en faut. Joseph Martel est un homme de haute taille petillant d'esprit, mais mordant en diable. C'est bien simple: ce sont des etincelles electriques qui voltigent dans l'air quand il lache un mot, et il arrache le morceau a tout coup. Vous voila en presence du trio. Nos trois amis se trouvaient a l'hotel de Joe Rivard attendant que leurs chevaux fussent atteles pour se rendre a Saint-Felix-de-Valois, une distance d'une vingtaine de milles environ, lorsque le convoi de Montreal stoppa en gare et Joe s'amena avec un voyageur que tous connaissaient mais qu'ils firent mine de ne pas voir. C'etait un bonhomme chauve, edente, le front legerement deprime, les yeux percants comme des vrilles, des oreilles larges en forme d'eventail qui se mouvaient toutes seules sous l'effort de la brise, un nez banal plante au-dessus d'une fente longitudinale annoncant un trou d'une profondeur insondable; plus bas, un menton inoffensif. Les quatre se mirent en route, chacun dans un "quat'roues" conduit par un habitant, dans l'ordre suivant: Corneillier tenait la tete de la caravane, suivi de pres par Tellier, Joseph Martel en troisieme lieu, enfin l'etranger. Tous descendirent a l'unique auberge de Saint-Felix-de-Valois et s'engouffrerent dans une vaste piece enfumee, puant le tabac canadien a plein nez, s'approcherent du comptoir et demanderent un "coup." L'etranger continuait a coller, et comme il vit que personne ne s'occupait de lui, il s'impatienta et s'approchant de M. Martel: --Vous ne me connaissez pas, hein? Eh bien! je suis venu de Montreal expres pour vous combattre, et a moi tout seul je vais vous demantibuler tous les trois. Mon nom est Proulx. --C'est vrai, je ne suis pas capable de vous placer, mais mon cheval vous connait bien. --Comment ca? votre cheval me connait? --Eh oui! Tout le long du chemin, il s'est tenu la queue en l'air, droite, vous savez, et je l'entendais qui faisait "Prout! prout! prout!" J'ai pense qu'il vous parlait. * * * * * En cour d'assises: Un "avocat" bien connu interroge un temoin recalcitrant: --Dites a la Cour si lorsque vous avez vu le cadavre pour la premiere fois, il respirait encore. --Vous voyez, qu'il plaise a la Cour, il ne repond pas. Parlez-moi d'un homme qui prend la parole et qui dit rien. LA ROUTE "DU PAYS FIN" [Illustration] La paroisse de Sainte-Therese, qui a eu l'honneur de me donner le jour, est "sandwichee" entre les beignets de Sainte-Rose et les habitants du "Pays Fin", c'est-a-dire, ceux de Saint-Janvier. En partant de Sainte-Therese, le voyageur malchanceux qui se dirige vers ce village se rend par la Cote Saint-Louis jusqu'a une montee de plusieurs milles de longueur ou il ne pousse que des bleuets, de la fougere et du sable. A droite, le chemin de Saint-Lin. Un vendeur de machines a coudre, bien connu dans tout le pays, s'etait rendu a Saint-Lin, dans les interets de son commerce, et il revenait de son voyage, en voiture, pour operer une descente chez les habitants du "Pays Fin". Rendu a une certaine distance de Saint-Lin, il se trouva en presence d'un carrefour, aux quatre fourches de chemin, comme on dit dans le pays. Il ne savait de quel cote se diriger lorsqu'il avisa un jeune homme qui coupait des rondins dans la cour d'une maison de ferme. Notre voyageur descendit de sa voiture et s'approchant du jeune garcon, lui demanda: --Dis donc, jeune homme, peux-tu me dire ou je suis? Oui, M'sieu, vous etes su' l'tas "d'ecopeaux." --Idiot! Il remonta dans sa voiture et prit au hasard, au petit bonheur, l'une des quatre fourches du chemin. Quelques arpents plus loin, il vit un vieillard, grave comme un notaire de campagne, perche sur une pagee de cloture, et fort occupe a se fabriquer un sifflet avec une branche de bois blanc qu'il gossait consciencieusement avec son couteau de poche. --Aie! le Pere, voulez-vous me dire ou je me trouve a l'heure qu'il est? --Ben, j'vas vous dire, M'sieu, j'me sus donne a rente a mon garcon la s'maine darniere, et depuis c'temps-la j'm'occupe pus de rien en toute. --Cre vieille bete, vous pourriez toujours bien me dire ou ce chemin-la va? --Ben, j'vas vous dire, M'sieu. J'ai soixante et dix-huit ans, et j'ai pas honte de l'dire; j'ai toujours reste icitte. Ce ch'min-la a jamais voyage. Je l'ai toujours vu a la meme place. Ya jamais ete nulle part. * * * * * --Vot' fille, M'sieu Desrosiers, comment est-elle de sa personne? --Ben, M'sieu, ma fille est belle, pis elle est jolie aussi. LES FILLES DE 'MASKA [Illustration] C'etait au cours d'une election federale; Victor Gladu, l'un des plus formidables tribuns populaires du pays, demandait aux electeurs d'Yamaska de lui renouveler son mandat. Le parti conservateur avait lance a ses trousses Charles Thibault qui le rencontrait dans un des bourgs-pourris bleus du comte. Apres la grand'messe, mon Thibault monte sur le husting et se lance dans une harangue formidable contre Gladu. Apres avoir epuise tout un repertoire d'accusations aussi idiotes qu'injustes, il termina ainsi: "Voyez, Messieurs les electeurs, ce document que je tiens ici dans ma main, et que j'etalerai devant vous lorsque je vous aurai explique la nature de ce papier. On a accuse M. Gladu d'etre franc-macon. Il l'a nie, c'est vrai, mais il n'a pas prouve cette negation qui n'est pas justifiee par les faits. M. Gladu s'est imagine qu'il etait impossible de trouver des preuves de son affiliation a cette societe si fortement defendue par notre Sainte Mere l'Eglise. Dieu merci, Messieurs, je suis catholique et catholique fervent, je n'ai pas honte de l'affirmer, et c'est pour cette raison que j'ai fouille a la bonne source pour decouvrir tout ce qu'il fallait pour confondre votre representant qui a l'audace de venir de nouveau devant vous sans rougir de honte avec un pedigree comme le sien. M. Gladu est non-seulement macon, mais en outre, il est orangiste. "Ce document que je detiens est son certificat d'admission dans la grande loge d'Ontario. Je vous ai promis de vous le montrer, eh bien! je tiens ma parole. Je deroule devant vous ce papier infame. Voyez-vous en tete le No d'ordre et le montant qu'il a paye pour etre admis. Regardez au centre tout en haut. C'est le portrait de la batisse ou s'abritent ces mecreants pour decouvrir des moyens de vous detruire, vous, les Catholiques de la Province de Quebec. Ici, c'est grave. Examinez dans le coin gauche ce grand sceau en rouge. Eh bien! ce sceau a ete imprime avec le sang des Catholiques. Votez pour lui maintenant, si vous l'osez!" C'etait une police d'assurance qu'il exhibait. Gladu rageait, mais Thibault etait deja loin. Dans l'apres-vepres, mon Charles s'etait rendu a Yamaska, le chateau-fort des rouges dans le comte. Il n'avait pas autant de chance de se faire ecouter, mais comme il avait toutes les audaces, il ne s'occupait guere de cela. En reponse au discours du representant de M. Gladu, il commenca ainsi le sien, croyant que ca pourrait passer. Il comptait sans son hote, car les gars de Yamaska n'ont pas froid aux yeux. "Messieurs les electeurs, si vous voulez me le permettre, je vais commencer mon discours par une citation de l'Ancien Testament qui s'adapte bien a la circonstance: "Soror mea pulchra est, sed ubera non habet"." Alors la foule: Parle francais, vlimeux, on comprend pas l'anglais, nous autres. "Oui, Messieurs, je vais vous parler francais, car je n'ai jamais eu honte d'exprimer ma pensee. Cette citation veut dire ceci en francais; "Les filles de 'Mask n'en ont pas, mais elles s'en mettent!..." Ce fut sa derniere parole et il se considera heureux de se tirer de la avec sa peau. * * * * * Authentique: Un ouvrier tombe du haut d'un clocher, a cent cinquante pieds dans l'air. En passant il voit ses camarades, et un cri du coeur lui echappe: --Prenez soin de mon coffre d'outils! BAPTISSETTE DUFOUR [Illustration] Il y avait autrefois a Sainte Therese un type extraordinaire qui repondait au nom de Baptissette Dufour. On ne trouvera jamais un etre aussi original que celui-la! Maquignon, il l'etait dans toute la force du mot. Au point de vue physique, il etait hybride, tenant du macaque et de l'ours. Hirsute, mal peigne, mal leche, il etait cependant d'une intelligence peu ordinaire, quand il s'agissait de ses interets; et il faut bien le dire, il ne songeait qu'a ces memes interets. Quand il brocantait un cheval quelconque, si l'animal avait perdu une partie de son poil quelque part, il lui collait de la peau de genisse de sa couleur, et il avait toujours dans ses poches une fiole de terebenthine pour activer son allure. Cela ne ratait jamais son effet, et le diable entrait dans le corps du cheval qu'il vendait invariablement a de bonne conditions. M. Le cure Ducharme, le plus brave homme de la creation, possedait un bouquet de bois au tournant de la montee de la Cote Saint-Louis, a un mille environ du village. Quand les finances de Baptissette etaient a la baisse, il se rendait au bois de M. le cure, coupait un voyage de bois et venait le vendre au village. Mon pere, qui etait notaire de son metier, avait son bureau au centre du village dans une maison a deux etages, collee a une autre maison basse et un magasin au coin occupe par M. McIntyre. Les dependances etaient a l'arriere, mais il n'y avait pas de barrieres. C'est-a-dire qu'on rentrait par un bout et qu'on sortait par l'autre sans aucune entrave. Baptissette revenait du bois avec sa charge et en arrivant sous les fenetres du bureau du pere, il le helait: --Paul! veux-tu acheter un voyage de bois? --Combien? --Quat' livres dix. --C'est bon, Baptissette. Fais le tour. Il lui donnait l'argent et Baptissette faisait le tour sans decharger le bois, et passait par l'autre rue pour se rendre au seminaire. --Bonjour, M'sieu le cure. --Comment ca va-t-il, Baptissette? --Ca va ben, M'sieu l'cure, j'sus ben pauvre. J'ai un voyage de bois a vendre. Voulez-vous l'ach'ter? --Combien? --Comme c'est a vous, j'vas vous l'laisser pour trois trente sous. * * * * * --Savez-vous ce que c'est qu'une embardee? --Non. --C'est d'essayer de faire manger un boeuf avec une cuiller. FORT COMME LES ARCHAMBAULT [Illustration] Le comte de l'Assomption est le berceau de la famille Archambault, tres nombreuse, d'ailleurs, et dont les ramifications s'etendent sur toute la province de Quebec dans le clerge, la magistrature, la politique, les emplois publics, etc. Ils ont justifie le dicton populaire bien connu dans tout le comte; "Forts comme les Archambault!" et ils laisseront certainement une marque indelebile dans notre histoire, ce qu'ils ont bien merite par leurs grands talents. Un jour, un habitant de l'Assomption, voulant abattre une demi-douzaine d'erables engagea deux Archambault, de solides gaillards, universellement reconnus comme le deux hommes les plus forts de la region. Il leur donna deux haches, un "godendard" et deux couennes de lard, en leur recommandant de faire diligence et de scier ces arbres en billots de douze pieds de longueur pour en faire du bois de service. Ils abattirent la plus grosse des six erables et se mirent en train de la scier, mais ca ne marchait pas du tout. Vers les deux heures de relevee, l'habitant se rendit au bois pour voir ou en etait rendu son ouvrage, lorsqu'il trouva les deux hommes face a face, tenant chacun un des manchons du "godendard"; ils avaient a peine effleure l'ecorce et se regardaient en chiens de faience. --Quoi-ce donc que vous avez faite depuis c'matin que vous etes la? C'est pas correct, ca. --C'est pas not' faute, M'sieu Painchaud, on a faite c'qu'on a pu, mais on est fort a fort. * * * * * Les eleves d'une ecole laique presentent une adresse et un cadeau a leur maitresse, une Irlandaise parlant le francais comme nous. Une des eleves, de retour chez elle, raconte ce qui s'est passe. --Et puis, qu'a fait mademoiselle M..., demande le pere, en apprenant tout cela? --Elle a braille, pas pour rire. * * * * * Un chien extraordinaire: Un de mes amis possede un chien phenomenal. Il me disait un jour: --Il ne lui manque que la parole, et encore! --? ? ? --Oui, l'autre jour je suis sorti avec lui pour aller a la chasse et comme je venais de tuer un gibier quelconque, je lui dis d'aller le chercher. --Ou ca? me fit-il. --! ! ! LE P'TIT TAUREAU CROISE [Illustration] Un brave cultivateur demeurant dans l'un des grands comtes de l'Est desirait ameliorer son stock de betail qui etait devenu fort degenere. Il s'en alla trouver un grand eleveur des environs. Celui-ci etait un anglais qui ne parlait pas le francais; Baptiste, lui, ne connaissait pas l'anglais. En revanche, tous les deux se comprenaient bien. A son arrivee, l'eleveur recut Baptiste avec la plus grande cordialite, en lui demandant des nouvelles de sa famille, et en le felicitant sur sa bonne apparence et l'etat merveilleux de sa sante. Pour repondre a cette politesse, Baptiste se confondit en remerciements, et il finit par cette phrase: --Ben, j'vas vous dire, j'su' ben content de voir l'interet que vous m'portez, mais c'est pas ca qui m'amene. --Well, Baptiste, all right. Speak out and let me know what you want this morning. --Ben, v'la c'que c'est, mon betail est d'assez bonne race, mais depuis quelques annees, il s'est deteriore, et j'voudrais ben l'ravigoter un peu. Pour ca, y'm'faudrait un p'tit taurau de bonne race. --That's all you want? Why, dear man alive, there's nothing easier. There are plenty of them in the field yonder. You have only to pick out your choice. --Ben, y en a un dans l'coin la-bas qui f'rait ben mon affaire, j'pense. Y m'a l'air fringant et il est ben faite. --No good for you. --Pourquoi ca? --When I tell you he is no good, I know what I say. I do not want to cheat you. That is why I tell you the beast is no good. --Encore, ya p'tet' ben moyen de savoir pourquoi. --Oh! certainly. It is becuse the animal is crossed. --Ah ben! dans c'cas-la, j'en veux pas! * * * * * Echo d'election: Au cours d'une campagne electorale dans Montcalm, un orateur echevele lance la phrase suivante: "Oui, Messieurs, voila huit ans que notre adversaire vous represente a Ottawa. Qu'a-t-il fait durant tout ce temps? Rien du tout. Il n'a pas meme ete capable de faire poser une riviere navigable dans le comte. Si vous elisez l'homme respectable que je represente ici ce soir, il en fera mettre trois dans le comte." (Applaudissements.) LE COCHON A TOINON [Illustration] Le "Grand Rang" entre St Jean-de-Matha et St-Felix-de-Valois, une distance de huit milles, n'a que cinq maisons. Le chemin de ligne est une belle route en pente douce bien entretenue, et semble fait expres pour le plaisir des amateurs de sport hippique, qui trottent leurs chevaux sur toute la distance. Ils viennent d'un peu partout, de Joliette, de Saint-Felix-de-Valois, de Saint-Jean-de-Matha, et d'autres paroisses environnantes. Toinon St-Georges demeurait a une distance d'environ dix arpents du village et il avait un cochon de "la grand'ordre" qui broutait tous les jours le long du fosse, sans demander permission a personne. Il lui etait facile de s'evader, car la barriere de Toinon avait ete arrachee de ses gonds et il ne restait que le piquet. Barthelemy Lavigne, un jockey de profession, se rendait tous les jours sur cette piste pour trotter ses chevaux. Un jour, Toinon, qui n'avait consulte personne au sujet de ses droits de faire pacager son cochon sur le chemin du roi, s'amena au bureau de l'avocat de la Couronne pour exposer ses griefs qui etaient reels a son avis et avoir une "consulte." Apres les salutations d'usage, l'avocat lui demanda le motif de sa visite, et voici l'histoire de Toinon: --J'voudrais savoir si Barthelemy Lavigne a l'droit de tuer mon cochon, parc'qu'y pacageait dans le chemin. --Mais non, Toinon, il n'a pas le droit de tuer ton cochon. Conte-moi comment c'est arrive et n'oublie aucune circonstance. --Vous savez, en arrivant su'l'coteau, il s'est mis a pousser son ch'val, pis mon cochon s'est mis a courir devant lui au p'tit trot--un grand cochon maigre--pis Barthelemy a pousse su' l'cochon, pousse, pousse, pousse, jusqu'a c'que l'cochon prenne l'epouvante; pis, en arrivant cheux nous, y a voulu prend' la barriere, pis y a vire drette en equerre. Mais, M'sieu, y v'nait si vite qu'y s'est attrape l'fouillon su' l'piquet et pis y s'est defouillonne nette, y avait pus yinq' l'ecuelle en d'sour. Pis, comme de raison, y etait trop maigre pour le manger, et j'perds tout. --Comme ton animal etait errant sur la voie publique, il n'y a pas de recours. --C'est ben sacrant, la loi! * * * * * --Dors-tu, Joe? --Non. --Prete-moi donc ton buggy neuf pour la journee. --J'dors. LE BATTE-FEU A PONCE-PILATE [Illustration] Dans une municipalite du Comte de Montcalm, le grand chemin du roi passait a travers une region tres accidentee, ou les cotes succedaient aux cotes sans interruption. Les fardiers lourdement charges et tires par de forts chevaux pouvaient a peine atteindre les sommets, et pour descendre les versants c'etait tout un hariat qui faisait le desespoir des charretiers et des rouliers. Les raidillons etaient tellement nombreux que des plaintes s'eleverent de tous cotes et que le conseil de comte fut saisi de l'affaire. On decida de tracer une nouvelle route dans un endroit plus favorable. Il n'y avait qu'une ravine peu profonde a traverser par ce chemin. Les habitants dont les fermes bordaient l'ancienne route n'etaient pas du tout satisfaits du changement. Ils protesterent fortement, mais rien n'y fit. De la une poursuite et un proces. La cause fut entendue a Joliette. Mon ami Olaues Therien, alors depute de Montcalm aux Communes, avait ete charge de la defense. Au cours du proces on appela un temoin passablement recalcitrant, rageur, bref dans ses paroles, et parlant plutot avec ses bras qu'avec sa langue. C'etait un petit homme roux, pas plus haut que ca, qui avait une tignasse epaisse, deux sourcils formidables, ou pour mieux dire, un seul sourcil courant sans un arret d'une tempe a une autre, et coupant en deux le visage d'un trait roussatre et broussailleux, large d'un doigt. La-dessous flambaient deux yeux sombres et mechants, si bien enfouis en la cavite de leurs orbites qu'on les y put croire enfonces a coups de poing. Une tres forte moustache herissee, des dents de loup, et au menton, des poils follets d'une couleur indecise, ressemblant furieusement a du poil de queue de vache jaune sale. Athlete trapu et ramasse, suant le poil jusque par les oreilles, il tenait un peu du gorille, dont il avait le bras long et velu, et la machoire a broyer des cailloux, et aussi du macaque toujours pret a massacrer et a manger ensuite quiconque s'en approche a bonne portee. Il rappelait ces deux types par l'exiguite du crane, la sournoiserie du coup-d'oeil, la cuisse courte tendant l'etoffe de la culotte. Lorsque le tour de l'avocat de la defense arriva, il examina son temoin avec mefiance. Celui-ci lui rendit sa politesse de la meme maniere. --Vous etes bien Baptiste Courtemanche? --Oui --Savez-vous lire? --Non Les oui et les non se succederent ainsi pendant plusieurs minutes. Enfin, Olaues, avec le plus grand sang-froid possible, lui dit: --Racontez a la cour ce que vous connaissez de la nouvelle route. --J'avais attele un ch'val violent su' mon "berlot" neu', et j'm'en allais a Rawdon, tout seul dans ma voiture. Faut vous dire que quand l'eau est haute, ca forme des inondations flambantes et des incendies d'eau impossibles a controler; quand il neige par la-d'ssus, ca fait des cahots, l'guabe m'en put, de trois pieds d'bas; rendu en haut de la cote, et avant d'descendre, j'arrete mon ch'val et je r'garde la route. Presqu'en bas, y avait un cahot effrayant. C't'egal, j'lache ma bete en m'disant: J'passerai ben. Mon ch'val arrive a c'cahot, se jette dedans, et en essayant de remonter, y casse mon travail et y file comm' s'il avait eu l'feu au darriere. Moe, j'tombe, et j'me defonce quasiment. J'ai sacre ane escousse, parc'que j'su' pas patient et j'me sus rendu a pied jusqu'a la premiere maison. --Attendez un peu, et repondez a une autre question tres importante. N'est-ce pas la que Ponce-Pilate a perdu son batte-feu? --Oui, ca doit et' la! ca doit et' la! ca doit et' la! * * * * * En flattant la vanite des gens, on peut leur faire commettre les sottises les plus grandes Possibles. UNE MALADIE CUTANEE [Illustration] Dans une famille d'un faubourg de Montreal une de ces bonnes Canayennes de l'ancien temps, comme on n'en fait plus de nos jours, est sur un lit de douleur et se gratte la fesse droite d'une maniere desordonnee, en proie a une maladie de peau qui la fait geindre horriblement. Cinq ou six commeres des environs, venues pour la consoler et compatir a ses peines, profitent de l'occasion pour jaser a qui mieux mieux sur ce cas extraordinaire, et font des commentaires sur cette maladie. --On a dit que c'etait la gratelle, dit l'une. --Le docteur est-il venu? remarque une autre. --Oui; il vient de partir. --Quoi-ce qu'il a dit? --Ben, il a dit comm' ca que c'etait une maladie cutanee. --Ah ben! c'est pas ben, ben etonnant, elle a eleve quatorze enfants. Alors une des commeres, qui n'avait encore rien dit et qui etait bien dans la soixantaine: --Ah binche! En v'la ane affaire! Moe, j'ai soixante ans passes, j'en ai eleve dix-neuf, j'sus veuve aujourd'hui, mais si j'trouve a me r'marrier, j'sus "paree" a r'commencer. * * * * * --On parle de monter "Chanteclerc" a Montreal. A ce sujet un vieux debris de la vieille garde theatrale, qui a traine sur les planches de tous nos theatres francais, faisait cette reflexion: --Oh! moi, je suis prete a me sacrifier encore une fois, et je remplirai avec plaisir le role de la faisane. --Ce sera une faisane faisandee, remarque une de ses bonnes petites amies. * * * * * A Quebec: On a signale a la Societe Protectrice des Animaux un abus qui nous interesse tous. Un individu est surpris, par un des membres de la Societe, frappant sans pitie une pauvre rosse: --Pourquoi battez-vous cette bete? --Pour la mener plus vite au port ou l'attend le bateau de Montreal? --Qu'en fera-t-on a Montreal? --De l'extrait de boeuf. LE TELEPHONE [Illustration] A l'epoque dont je vous parle, c'etait dans les premiers jours de la telephonie. Mon ami Buies etait redacteur du _Pays_, avec MM. Napoleon Aubin et Auguste Achintre, trois rudes plumes, comme ceux de cette date le savent. Napoleon Bienvenu, qui devait prendre plus tard la direction du _National_, entrait dans la carriere. Quoique possedant des talents incontestables, et surtout une memoire prodigieuse, il etait lourd et ne pouvait percevoir de suite la portee des choses. Il s'informa aupres de Buies de cette nouvelle invention qui devait bouleverser le monde. Celui-ci se lanca dans une dissertation scientifique a perte de vue. --Vous savez, Bienvenu, ce phenomene que vous constatez n'a pas encore donne tous les resultats qu'on en attend. Mais, meme aujourd'hui, c'est un vol commis envers la Divinite; c'est une parcelle du pouvoir celeste que personne ne comprend bien encore, mais, la science aidant par la suite des siecles, on finira bien par decouvrir le principe de cette force inconnue dont on ignore aujourd'hui l'origine. Dans l'intervalle on ne peut faire autre chose que de constater le fonctionnement de cette machine merveilleuse. Si vous voulez bien me le permettre, je vais vous faire une demonstration _ad rem_ que vous saisirez facilement, tant elle est simple. Nous allons supposer un chien dont les pattes de devant seraient appuyees sur l'un des quais a Montreal, et celles de derriere sur le quai de Longueuil. Vous marchez sur la queue de l'animal et il aboie a Montreal. Voila ce que c'est que le telephone. --Je vous demande pardon, M. Buies, il n'y a pas de chien long comme ca! LA BALANCE DE PIERRE [Illustration] Pierre Matte est un boulanger residant dans une paroisse du Nord. Il a parmi ses clients un nomme Joseph Latulippe, un habitant qui a plusieurs vaches et qui vend le beurre qu'il fait parmi les gens du village. Ce dernier ne paie jamais de pain au boulanger, mais en revanche il lui fournit du beurre par paquet de trois livres chaque fois qu'il en a besoin. Cet echange durait depuis plusieurs annees, et il n'y avait jamais eu de reglement de compte entre les deux copains qui se traitaient en amis. Le boulanger avait un petit air narquois qui l'agacait beaucoup. Il cherchait un moyen de lui remettre ce procede inqualifiable. En dehors de cette legere circonstance, Pierre faisait toujours preuve d'une politesse exageree envers son vieux camarade, qui lui rendait la pareille. Ils avaient grandi cote a cote, continuant a s'estimer reciproquement. Cependant Joe etait toujours a la recherche d'un moyen de _scier_ Pierre sans qu'il put s'en formaliser. Un bon jour il crut avoir trouve le joint et il resolut de mettre de suite son projet a execution. La premiere fois qu'il rencontra son ami, il l'arreta et lui dit ceci: --Mon ami Pierre, tu voudras bien m'permettre une remarque que j'fais sans mauvaise intention. C'n'est pas pour te blesser que j'vais t'dire ca, mais y a longtemps qu'ca m'chicote, et j'voulais te l'dire plus vite, mais ca m'coutait trop, de peur de t'faire d'la peine. Mais tu sais, j'sus ben patient, et je n'voulais pas briser nos relations amicales. Ton pain pese pas l'poids. --Vrai? Ben, ca m'etonne pas, parc'que tu sais ben que j'ai pas de balance. --Comment fais tu ton compte pour pas t'tromper su' l'poids d'ta marchandise? --C'est ben simple. J'ai plante un piquet et j'ai mis une barre en travers, comm'ca; j'ai pris ensuite des ficelles que j'ai attachees a deux especes de soucoupes, comm'ca. Mon pain est suppose peser trois livres, ton paquet d'beurre, aussi. Quand je r'cois ton beurre, je l'mets dans une des soucoupes, et j'mets l'pain dans l'autre. Ca balance End of the Project Gutenberg EBook of Contes, anecdotes et recits Canadiens. by Aristide Filiatreault *** END OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK ANECDOTES ET RECITS CANADIENS *** ***** This file should be named 12602.txt or 12602.zip ***** This and all associated files of various formats will be found in: https://www.gutenberg.org/1/2/6/0/12602/ Produced by Renald Levesque and the Online Distributed Proofreading Team. 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It exists because of the efforts of hundreds of volunteers and donations from people in all walks of life. Volunteers and financial support to provide volunteers with the assistance they need, is critical to reaching Project Gutenberg-tm's goals and ensuring that the Project Gutenberg-tm collection will remain freely available for generations to come. In 2001, the Project Gutenberg Literary Archive Foundation was created to provide a secure and permanent future for Project Gutenberg-tm and future generations. To learn more about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation and how your efforts and donations can help, see Sections 3 and 4 and the Foundation web page at https://www.pglaf.org. Section 3. Information about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non profit 501(c)(3) educational corporation organized under the laws of the state of Mississippi and granted tax exempt status by the Internal Revenue Service. The Foundation's EIN or federal tax identification number is 64-6221541. Its 501(c)(3) letter is posted at https://pglaf.org/fundraising. Contributions to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation are tax deductible to the full extent permitted by U.S. federal laws and your state's laws. The Foundation's principal office is located at 4557 Melan Dr. S. Fairbanks, AK, 99712., but its volunteers and employees are scattered throughout numerous locations. Its business office is located at 809 North 1500 West, Salt Lake City, UT 84116, (801) 596-1887, email business@pglaf.org. Email contact links and up to date contact information can be found at the Foundation's web site and official page at https://pglaf.org For additional contact information: Dr. Gregory B. Newby Chief Executive and Director gbnewby@pglaf.org Section 4. Information about Donations to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation Project Gutenberg-tm depends upon and cannot survive without wide spread public support and donations to carry out its mission of increasing the number of public domain and licensed works that can be freely distributed in machine readable form accessible by the widest array of equipment including outdated equipment. Many small donations ($1 to $5,000) are particularly important to maintaining tax exempt status with the IRS. The Foundation is committed to complying with the laws regulating charities and charitable donations in all 50 states of the United States. Compliance requirements are not uniform and it takes a considerable effort, much paperwork and many fees to meet and keep up with these requirements. We do not solicit donations in locations where we have not received written confirmation of compliance. 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Hart was the originator of the Project Gutenberg-tm concept of a library of electronic works that could be freely shared with anyone. For thirty years, he produced and distributed Project Gutenberg-tm eBooks with only a loose network of volunteer support. Project Gutenberg-tm eBooks are often created from several printed editions, all of which are confirmed as Public Domain in the U.S. unless a copyright notice is included. Thus, we do not necessarily keep eBooks in compliance with any particular paper edition. Most people start at our Web site which has the main PG search facility: https://www.gutenberg.org This Web site includes information about Project Gutenberg-tm, including how to make donations to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation, how to help produce our new eBooks, and how to subscribe to our email newsletter to hear about new eBooks.